mardi 19 octobre 2010

[Revue de presse] - [70] - [12-19 octobre 2010]

KARACHI : REVELATIONS SUR L'INTERMEDIAIRE BALLADURIEN
Mediapart, Fabrice Arfi, Fabrice Lhomme, 11/10/ 2010
"Interrogé comme témoin le 15 avril par le juge Trévidic, qui enquête sur un lien éventuel entre les troubles dessous financiers du contrat des sous-marins Agosta et l'attentat de Karachi, qui a causé la mort de onze Français le 8 mai 2002, Ziad Takieddine avait par exemple affirmé à plusieurs reprises: «En ce qui me concerne, je ne me suis pas occupé du contrat des sous-marins.»

Seulement voilà, le 16 juin dernier, Emmanuel Aris, un ancien haut dirigeant de la Direction des construction navales (DCN, rebaptisée depuis DCNS), le constructeur des sous-marins vendus au Pakistan, a livré aux policiers de la Division nationale des investigations financières (DNIF) un contrat signé de la main de Ziad Takieddine concernant le versement des fameuses commissions suspectes en marge du marché Agosta. Derrière elles se cache peut-être un système de financement politique illicite grâce aux ventes d'armes.

Mediapart, qui a obtenu copie de ce document clé, le publie en intégralité ci-dessous: "

lien direct : http://www.mediapart.fr/article/offert/e5d6f3af3f35803f58563845f08b46f3

CONTRAT-TAK



BALLADUR 1995 : LES SECRETS DE LA DÉCISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

Mediapart, Mathilde Matthieu, 11/10/2010
"Octobre 1995, rue Montpensier, à Paris. Roland Dumas, président du Conseil constitutionnel, lève la séance. Les neuf membres de l’institution viennent de se livrer à un exercice encore inédit sous la Ve République: contrôler les comptes de campagne des candidats à l’élection présidentielle (remportée quelques mois plus tôt par Jacques Chirac).

En cinq jours de débats, ils ont rejeté un seul dossier pour irrégularité – celui de Jacques Cheminade (0,28% des voix). Sur tous les autres, les «Sages» ont apposé leur tampon – permettant le remboursement par l’Etat d’une partie des dépenses engagées. Pour marquer ce moment historique, Roland Dumas invite tout le monde à déjeuner: ses huit collègues, mais aussi les dix rapporteurs adjoints du Conseil.

Désignés trois mois plus tôt, ces hauts fonctionnaires, maîtres des requêtes au Conseil d’Etat ou conseillers référendaires à la Cour des comptes, ont abattu seuls le travail d’«instruction»: pour évaluer l’exhaustivité et la sincérité des comptes, ils ont épluché les volets dépenses et recettes, les factures présentées par les candidats, les listes de donateurs, etc.

Ce jour-là, au moment où le Conseil lève le camp, ils se braquent et refusent l’invitation – une claque pour Roland Dumas. En fait, ces rapporteurs sont excédés, certains écœurés: alors qu’ils recommandaient le rejet pur et simple du compte d’Edouard Balladur, leur avis vient d’être balayé en séance par les «Sages», qui ferment les yeux sur une recette de 10 millions de francs en espèces d’origine non justifiée…

Quinze ans plus tard, ce secret – censé dormir dans les archives de la rue Montpensier jusqu’en 2020 – s’étale au grand jour: vendredi 8 octobre, Libération a publié des extraits des conclusions rédigées par les rapporteurs à l’époque. En fait, c’est la Brigade centrale de lutte contre la corruption de Nanterre qui a fouillé les archives du Conseil constitutionnel, dans le cadre d’une enquête préliminaire en marge de l‘attentat de Karachi sur l’hypothèse d’un financement illégal de la campagne d’Edouard Balladur (par le biais de «rétrocommissions» récupérées sur des ventes d’armes au Pakistan).

Avec quinze ans de «retard», Mediapart a reconstitué cet épisode peu reluisant: comment le Conseil, garant de la régularité de l’élection du Président, a-t-il pu valider un compte jugé irrégulier par ses propres rapporteurs?

Dix millions dans un coffre
Tout démarre, en fait, le 12 juillet 1995: Roland Dumas désigne ce jour-là une équipe de dix «adjoints», qui vont se répartir les comptes de campagne tout juste déposés par les candidats – dont ceux d’Edouard Balladur (éliminé dès le premier tour), de Lionel Jospin (battu au second) et de Jacques Chirac (entré le 17 mai à l’Elysée). Parmi ces hauts fonctionnaires, pas mal sont trentenaires, scrupuleux, le mors aux dents. Mais leur tâche de contrôle s’annonce périlleuse: ces rapporteurs n’ont aucun pouvoir d’investigation réel – en tout cas pas ceux d’un officier de police judiciaire. Ils peuvent simplement réclamer – sinon quémander – «toute information utile» ou «document relatif aux recettes et aux dépenses», auprès des intéressés ou de tiers. Ce manque de moyens tranche avec l’énormité des enjeux: si le compte de Jacques Chirac est rejeté, son élection sera tout bonnement annulée; si le dossier d’un perdant est retoqué, ce dernier perdra son droit au remboursement par l’Etat d’une partie de ses frais de campagne – en clair, il sera ruiné…

Trois d’entre eux empoignent le dossier de l’ancien Premier ministre, Edouard Balladur, qui a présenté le bilan suivant (pour ses 12 mois de campagne):

Très vite, les rapporteurs froncent les sourcils, surpris par deux incongruités majeures: d’abord, un paquet de dépenses ne sont pas comptabilisées dans les 83,8 millions déclarées (sachant qu’un plafond légal de 90 millions a été fixé pour le premier tour de l’élection); ensuite, aucune pièce ne justifie l’origine d’un versement de 10,25 millions de francs en espèces, déposés en grosses coupures le 26 avril 1995 sur le compte bancaire de l’AFICEB (l’association de financement de sa campagne)…

Dès la fin du mois de juillet, les fonctionnaires entament un échange de courriers avec le représentant du candidat – Edouard Balladur ne répondra jamais en direct, malgré plusieurs lettres recommandées à son nom avec accusés de réception… A la fin de l’instruction, leur religion est faite: ils jugent indispensables de «rétablir l’exhaustivité des dépenses», en clair de réintroduire des millions de francs correspondant à des réunions publiques, des voyages outre-mer, des locations de permanences électorales, des frais de sécurisation de meetings, ou encore des sondages… Avec leurs calculs, le plafond légal est enfoncé.

Surtout, dans leur rapport, ils écrivent: «Le candidat ne sait manifestement pas quelle argumentation opposer aux questions» soulevées par le dépôt des 10,25 millions de francs, «dépourvu de tout justificatif». D’où vient cet argent liquide? Des fonds secrets de Matignon? D’un circuit de financement occulte? Sinon, pourquoi tant de liasses déposées d’un seul coup? Interrogé, le représentant d’Edouard Balladur a bien tenté deux explications: cette somme proviendrait de «ventes diverses de gadgets et de tee-shirts, ainsi que de “collectes au drapeau” effectuées lors des manifestations et réunions publiques»; elles «auraient été accumulées dans un coffre-fort et déposées sur le compte bancaire globalement, à la fin de la campagne, pour éviter les transports de fonds»….

Mais les rapporteurs rappellent qu’il aurait fallu, dans ce cas, détailler les «recettes manifestation par manifestation», et produire «un relevé sommaire des objets vendus» – comme d’autres candidats l’ont fait, Lionel Jospin par exemple. Enfin, ils n’accordent aucun crédit à l’hypothèse de dons gardés au chaud et versés d’un bloc – d’autres sommes en espèces ayant été «déposées régulièrement sur le compte bancaire» (précisément 22 fois entre le 13 mars et le 14 avril 1995). Les fonctionnaires, au passage, s’autorisent un trait d’ironie cinglant: «On voit mal un ancien ministre des Finances (…) laisser dormir jusqu’à dix millions dans un coffre au lieu de les placer pour récupérer quelques intérêts…» En bref, à leurs yeux, l’équipe d’Edouard Balladur n’apporte «aucun commencement de preuve».

Dans leur rapport final, ils lâchent donc le mot fatidique, proposant le «rejet» du compte!..."
suite : http://www.mediapart.fr/journal/france/101010/balladur-1995-les-secrets-de-la-decision-du-conseil-constitutionnel



KARACHI : L'UMP REFUSE DE LIVRER DES DOCUMENTS A LA JUSTICE
Nouvelobs.com, 14/10/2010
"Y a-t-il "entrave à la justice" dans le cadre de l'enquête sur l'affaire Karachi ?

Interrogée sur ce point mercredi lors de la séance des questions au gouvernement par le député PS Bernard Cazeneuve (rapporteur de la mission parlementaire sur l'attentat de Karachi en 2002 qui avait coûté la vie à onze salariés de la Direction des constructions navales et fait naître des soupçons sur le financement de la campagne présidentielle d'Edouard Balladur en 1995), la ministre de la Justice Michèle Alliot-Marie a nié toute obstruction au travail judiciaire.



Pourtant, si les documents que publie Mediapart, jeudi 14 octobre, ne suffisent à accréditer cette accusation, ils montrent néanmoins que rien n'est fait pour faciliter la tâche de la justice. Il s'agit de lettres échangées ces derniers mois entre le député UMP Guy Teissier, président de la commission de la défense à l'Assemblée, et le juge d'instruction Marc Trévidic, chargé du versant terroriste de l'affaire Karachi..."

suite : http://tempsreel.nouvelobs.com/actualite/politique/20101014.OBS1265/karachi-l-ump-refuse-de-communiquer-des-documents-a-la-justice.html


INTERVIEW : TEISSIER [UMP] SUR KARACHI : "JE NE FAIS AUCUNE RÉTENTION D'INFORMATION.
Nouvelobs.com 15/10/2010
"...S'appuyant sur des lettres que vous avez échangées avec le juge d'instruction Marc Trévidic, Mediapart vous accuse de faire obstruction au magistrat dans le cadre de son enquête sur l'affaire Karachi. Que répondez-vous à ces accusations ?

Réponse :
Je suis d'abord scandalisé que ces courriers que nous avons échangés, le juge et moi-même, puissent circuler ainsi au grand jour.

Ensuite, je trouve que l'attitude de Mediapart est une posture politicienne. Je ne fais absolument pas de la rétention d'informations, bien au contraire, puisque c'est moi qui ai voulu cette mission d'information parlementaire sur l'affaire Karachi. J'ai même fait en sorte qu'elle soit plurielle avec deux UMP, un PS, un communiste, un centriste…

Pour ce qui est de la demande du juge d'instruction, je vous répète ce que je lui ai écrit et que vous avez pu lire puisque cela a été publié. Il n'y a pas de verbatim des auditions, mais seulement des prises de notes, des brouillons. Je ne pense pas qu'il y ait dans ces brouillons autre chose que ce qui a été rendu public. Je ne comprends pas qu'il veuille accéder à ces notes.

Mais s'il le souhaite, il y a un procédé légal : il peut déposer une demande sur le bureau de l'Assemblée, et ce sera alors au président de l'Assemblée de statuer [Bernard Accoyer, UMP, ndlr.]. Moi je ne suis que le président de l'une des commissions de l'Assemblée, ce n'est pas à moi de prendre cette décision...."

suite : http://tempsreel.nouvelobs.com/actualite/opinion/20101014.OBS1308/interview-teissier-ump-sur-karachi-je-ne-fais-pas-de-retention-d-informations.html


ATTENTAT KARACHI : UNE NOTE SECRET DE BERCY SÈME LE DOUTE
LeMonde - 15/10/2010
"Selon des informations diffusées par Mediapart, une note classée "confidentiel défense" datant de 1993 et adressée à Matignon "montre que le contrat des sous-marins Agosta au cœur de l'affaire de Karachi était considéré par un haut fonctionnaire de Bercy, alors au service du ministre des finances Michel Sapin (PS), comme 'risqué' et 'déraisonnable' pour l'Etat".

Or, explique le site, le contrat sera quand même signé "en hâte" en septembre 1994 par le gouvernement d'Edouard Balladur, avec l'aval de François Léotard, alors ministre de la défense, et de Nicolas Sarkozy, ministre du budget.

Quinze personnes, dont onze employés français de la direction des constructions navales (DCN), qui travaillaient à l'exécution du contrat Agosta au Pakistan, ont été tuées le 8 mai 2002 dans un attentat à Karachi. Une "vengeance" qui pourrait être liée au non-versement de rétrocommissions illégales à des intermédiaires pakistanais chargés de faciliter l'exécution du contrat, d'une valeur de 826 millions d'euros. La justice soupçonne le RPR d'avoir récupéré ces rétrocommissions pour alimenter son compte de campagne.

Selon Mediapart, "la découverte de ce document confidentiel vient renforcer, une fois de plus, les soupçons sur les arrière-pensées politiques qui ont présidé à la conclusion de ce marché d'armement". Au mois de juin, Mediapart avait rendu public des éléments d'un rapport de synthèse de la police luxembourgeoise, daté du 19 janvier 2010, qui met en cause Nicolas Sarkozy, alors ministre du budget, pour avoir "directement supervisé et validé depuis Bercy la constitution au Luxembourg d'une obscure société offshore, baptisée Heine, par laquelle ont transité les commissions"."

lien direct : http://www.lemonde.fr/politique/article/2010/10/15/attentats-de-karachi-une-note-secrete-de-bercy-seme-le-doute_1426921_823448.html


KARACHI : LA COMMISSION DU SECRET DEFENSE A LA DECLASSIFICATION DE DOCUMENTS
Lemonde.fr 16/10/2010
"...Dans le dossier de l'attentat de Karachi, instruit pour son volet terroriste par le juge Marc Trévidic, qui avait demandé la déclassification en mai, l'avis favorable porte sur "un document émanant de la DGSE du 1er septembre 2000", "onze documents émanant de la DGA", la Délégation générale de l'armement, et "un télégramme du 9 février 1998 de la mission française d'Islamabad". Pour l'un des documents de la DGA, datant de 1994, l'avis favorable ne concerne toutefois que les deux premières pages...."
suite : http://www.lemonde.fr/societe/article/2010/10/16/karachi-la-commission-du-secret-de-la-defense-favorable-a-la-declassification-de-documents_1427007_3224.html